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Dernière mise à jour Le 20 Août 2011.

HISTOIRE DE LA GUINÉE - La IIéme république

Vers la IIIème république

Prendre le pouvoir fut facile : " La mangue était mûre. " L’exercer ne l’est pas, d’autant que les militaires n’en avaient aucune expérience ou n’avaient pour exemple que les pratiques du régime défunt. Comportements et attitudes, forgés par vingt-six ans de totalitarisme, ne peuvent disparaître du jour au lendemain : " Ce qui a caractérisé le P.D.G., le président a toujours raison ; la justice ne se fait pas comme il faut en Guinée et tout cela dépend de ce que nous avons vécu ; jusqu’aujourd’hui, nous n’avons pas réussi l’unité nationale parce que nous sommes racistes. " (Conférence de presse de Lansana Conté, 3 avr. 1988.) Les militaires ont imposé une transition qui n’allait pas de soi et se sont assigné une énorme tâche qui ralliait, dans les débuts, un consensus national : l’organisation d’une économie de marché, la mise sur pied d’un État de droit. Le paradoxe était de prétendre y arriver en " commandant militairement ", pour reprendre les termes du nouveau chef d’État, sans trop se préoccuper, pendant huit ans, de règles juridiques, de légalité ou d’institutions. Toujours est-il qu’ils sont les grands bénéficiaires de la IIe République (soldes, part importante consacrée aux militaires, mais soigneusement cachée dans le budget de l’État, postes clés). Discours et pratiques se nourrissent d’ambiguïtés et de contradictions. Le rôle et la place des ethnies dans la société sont conçus comme autrefois : elles sont incompatibles avec l’unité nationale. Cela n’empêche pas le régime d’en tenir le plus grand compte, quitte à donner prise à l’accusation de constituer un État soussou (fonctions ministérielles et militaires) ou à tenir compte du lieu de naissance dans la nomination des préfets. Il n’est pas le premier à se débattre avec ce problème ! L’appel au secteur privé, national ou étranger, pour des investissements et des créations d’entreprises est contredit par leur mise en cause dans des déclarations officielles : " Leur présence n’ajoute rien à l’évolution de la Guinée. " Aucun procès public n’a été intenté contre d’anciens dirigeants, fût-ce sous la seule inculpation de délits économiques, comme cela avait été promis en 1984. Une centaine de condamnations, portées dans le plus grand secret, furent rendues publiques en mai 1987, cela couvrant aussi des exécutions sommaires antérieures. Des tortionnaires continuent à se promener impunément devant leurs victimes, tandis que la commission d’enquête sur les exactions de l’ancien régime, après quelques réunions, a sombré dans l’oubli. D’autres séides de Sékou Touré, officiers et policiers de haut rang, exercent sans vergogne des responsabilités importantes, voire ministérielles (jusqu’en février 1992). En outre, la remise en ordre du système judiciaire est entreprise, mais, dans le même temps, les incitations officielles à recourir à une " justice populaire " eurent pour conséquence le lynchage public de petits voleurs en avril-mai 1988. La pression sociale et le mécontentement populaire contraignirent le régime militaire à entamer un processus très contrôlé de démocratisation. Jusque-là sans institution légale, il a fait adopter par référendum (98,68 p. 100 de votes favorables) une loi fondamentale (Constitution) en décembre 1990. Celle-ci prévoit l’instauration d’un régime présidentiel : président et assemblée élus pour cinq ans ; séparation nette entre exécutif, législatif et judiciaire. Elle " affirme solennellement son opposition fondamentale à tout régime fondé sur la dictature, l’injustice, la corruption, le népotisme, le régionalisme ". Le rôle des partis politiques est reconnu. Mais, disposition probablement unique, la Constitution prévoit sa propre suspension le jour même de son adoption, puisqu’elle ne doit entrer en vigueur qu’un an après. Quant aux élections présidentielle et législatives, elles se tiendront " à l’issue d’une période transitoire n’excédant pas cinq ans ", donc au plus tard en décembre 1995. En attendant la mise en place des institutions, un Conseil transitoire de redressement national (art. 93 et 94) est investi du pouvoir législatif. Ce Conseil est à l’entière discrétion du président (nomination des membres, règles de fonctionnement et compétences). Paradoxe supplémentaire : le président demeure de facto, depuis son autoproclamation en 1984, sans légitimité issue d’une élection générale ; en décembre 1992, celle-ci a d’ailleurs été reportée sine die. Mais, avec cette Constitution, il s’est donné une réelle marge de manœuvre tant vis-à-vis des militaires hostiles à un retour dans les casernes qu’envers les oppositions qui réclamaient une conférence nationale. Depuis le remaniement de février 1992, le gouvernement ne compte plus que trois militaires sur dix-sept ministres, et les préfets, pour la plus grande partie d’entre eux, sont désormais des civils. D’anciens ministres ont quitté l’uniforme pour se lancer dans la politique. Les oppositions sont loin de désarmer, malgré toute une série de lois organiques (statut de la magistrature, Code électoral, état de siège, liberté de presse, charte des partis politiques) adoptées en décembre 1991. Venant tardivement, elles ne sont guère portées au crédit du régime militaire, car plusieurs d’entre elles ont été devancées, comme la liberté de la presse, ou imposées, comme le multipartisme (au lieu du bipartisme voulu par le pouvoir). Une lettre quasi périodique et signée du nom de son auteur, Ba Mamadou, avait osé ouvrir la voie à une presse d’opposition en avril 1990. Quarante-deux partis, dont cinq ou six d’audience nationale, se sont engouffrés dans l’espace politique enfin reconnu. Ils ont pris en charge le renouveau de la vie politique. L’ancien P.D.G. prétend même renaître, reposant de la sorte le problème toujours éludé du jugement à porter par les Guinéens sur vingt-six ans de totalitarisme sanglant. Les militaires ont fini par consentir une institutionnalisation de leur régime sous couvert de formes démocratiques. Jusqu’où sont-ils prêts à aller ? Ne s’agirait-il pas plutôt de l’émergence d’une IIIe République ?