HISTOIRE DE LA GUINÉE - Aggravation du sous développement
Structure de production agricole
L’agriculture (avec l’élevage et la forêt) occupe toujours la plus grande partie de la population active, soit environ 80 p. 100, et procure de 30 à 40 p. 100 du produit national. Sa part dans les exportations est tombée de 60 p. 100 en 1958 à moins de 4 p. 100 en 1980. Malgré leur variété, les productions (tabl. 2) ne permettent pas de satisfaire les besoins de la nation, ce qui nécessite l’importation de 70 000 à 120 000 tonnes de riz chaque année et avait amené l’instauration d’une carte de ravitaillement. Maladies, pluviosité parfois défavorable, faible productivité, insuffisance des investissements, à -coups du système de commercialisation et politique des prix conjuguent leurs effets pour provoquer une détérioration croissante depuis l’indépendance. La production de manioc et de patates était estimée à 488 000 tonnes en 1960, celle du fonio et celle du maïs à 480 000 tonnes chacune. La production vivrière par habitant n’a cessé de régresser à un taux moyen de _ 0,4 p. 100 pour la période 1960-1970, de _ 1 p. 100 pour 1970-1980 et de _ 2 p. 100 pour 1980-1985 (chiffres de la C.N.U.C.E.D.). La Guinée est au nombre des sept pays ayant réalisé le plus mauvais score en 1980-1985. La production des cultures d’exportation n’a pu, non plus, se maintenir mais donne lieu à une importante commercialisation illégale dans les marchés parallèles. Il en va de même pour le secteur de l’élevage (stagnation du troupeau, exportations hors des circuits officiels). D’où l’existence d’une économie parallèle de survie. L’ensemble de la production agricole est toujours assuré (à 80 p. 100) par des exploitations familiales de petite taille, selon les méthodes traditionnelles, avec pour objectif le minimum, vu les normes imposées et les livraisons obligatoires. Toutes les tentatives d’organisation collective (coopératives de production, centres de modernisation rurale) ou étatique (fermes d’État sur le modèle soviétique, brigades de production, fermes agropastorales) échouèrent successivement. Tout indique l’impuissance du régime de Sékou Touré à maîtriser les problèmes du secteur agricole : la part des brigades dans la production totale n’a pas dépassé 5 p. 100 dans les années 1978-1980. Les réorganisations contradictoires des circuits de commercialisation ne pouvaient qu’aggraver la situation. Les monopoles d’État créés dans les années 1960-1963 furent remplacés par des entreprises nationales d’importation sectorielle, en même temps que des facilités étaient données aux entreprises privées. Mais, dès l’année suivante, le gouvernement remit en cause les mesures de libéralisation pour finalement décréter en 1975 l’abolition de tout commerce privé et la suppression des marchés villageois hebdomadaires. Un monopole d’État très strict fut rétabli. À nouveau, le commerce privé fut autorisé en 1979 sous certaines conditions : engagement d’honneur (ne plus jamais " affamer le peuple ", ni " préférer l’argent à la nation ", ni enfin " se livrer aux fraudes économiques "), respect des prix officiels... Mines Le potentiel minier n’a commencé à être mis en valeur qu’à partir de 1953 avec l’exploitation du minerai de fer de la presqu’île Kaloum-Conakry (jusqu’en 1966, date d’arrêt de la mine) et celle d’un premier gisement de bauxite. Depuis l’indépendance, le secteur minier est le seul à avoir connu une réelle croissance. Trois produits (bauxite et alumine, diamant à compter de 1984) assurent à eux seuls plus de 90 p. 100 des exportations officielles en valeur (98 p. 100 en 1985). La Guinée est désormais le deuxième producteur mondial de bauxite avec plus de 11 millions de tonnes par an (tabl. 3). L’exploitation est assurée par deux sociétés d’économie mixte et une société d’État : la Compagnie des bauxites de Guinée (C.B.G.) sur le gisement de Sangarédi, la société Friguia sur celui de Badi-Konkouré avec transformation de la bauxite en alumine et l’Office des bauxites de Kindia (O.B.K.) sur ceux de Débélé. Pour les deux premières, la Guinée est associée (49 p. 100 du capital et 65 p. 100 des bénéfices) à des multinationales étrangères sous la direction respective d’Alcan (Canada) et de Pechiney (France). Des négociations menées en 1974-1975 portèrent le prix de la tonne de bauxite de 20,4 à 32,8 dollars (en 1980), puis à 36 dollars. Dans le cas de l’O.B.K., un accord d’assistance technique et de commercialisation fut signé pour trente ans avec l’U.R.S.S. qui permet depuis 1974 des exportations vers ce pays à un prix très inférieur tout en assurant le remboursement des dettes guinéennes (amortissements, importations) dans des conditions peu précises (accords de troc). S’agissant du diamant, une société mixte, Aredor, associe la Guinée (50 p. 100 du capital, 30 p. 100 des bénéfices) à des partenaires australiens, anglais et suisses. La Guinée est également associée à la commercialisation du diamant. En 1986, la production est montée à 204 000 carats. Le gisement en exploitation est le plus riche du monde par la valeur des pierres extraites (93 p. 100 de joaillerie). Les ressources énormes dont dispose la Guinée, un nouvel afflux de capitaux, l’instauration d’une IIe République lui permettront-ils de voir son économie décoller, le sort de ses habitants s’améliorer avant l’an 2000 ?